Retour

Mon cœur chavire et j’ai parfois la nausée. Je ne sais pas sur quel pied danser, funambule, un fil me traverse de part en part et je tournoie.

J’aime marcher. Sur les sentiers un peu escarpés, je sens mon corps en mouvement, mes muscles qui travaillent, je me sens exister. Libre. Seule. Une. Habitée.

Mais, sur les sentiers un peu escarpés, j’ai parfois peur de manquer d’équilibre et de sombrer. Mon cœur se soulève, car je me vois et je sens mon corps endolori par la marche, se disloquer dans la chute.

Ma capacité à faire confiance, à me faire confiance, à croire en les autres et en moi s’est abîmée. Ma foi a subi une érosion qui me laisse ce poids sur le cœur. Pourtant cet équilibre est en moi, là, ici. Je ne tombe pas. Mes pieds me guident, humbles, au contact du sol irrégulier.

Si seulement je me laissais aller, je pourrais sentir mes racines, celles qui m’ancrent en moi, sans me lier, sans me retenir, sans m’étouffer. Celles qui m’ancrent dans la vie, pleine, entière, profuse, complète.

Mon cœur pourrait chavirer sur un pas de danse, un tourbillon de rires, une ode à la terre vivante.

Dernières traces d’un autre carnet
Sérénissime, 16 mai 2007.

10 réflexions sur « Retour »

  1. On pourrait très bien s’écrire dos à dos sur la grande cascade. Il se pourrait que j’arrive en retard pour te trouver déjà accroupie sur la roche hideuse. Je pourrais toujours constater que tu sais trop bien t’absenter. Le bois de boulogne pourrait ce soir là se passer de soleil et de raison. Il se pourrait que je m’accroupisse dos à dos à toi sur la roche hideuse. Il se pourrait que tu regardes vers les lumières de suresnes. On pourrait oublier le temps. L’étang du reservoir pourrait se rapprocher puis s’effondrer. Je pourrais glisser dans tes mains un carnet et un crayon. Il se pourrait que sur le papier froid tes mains fassent chanter d’angéliques lueurs et que ces dernières se déversent et s’empilent en strates pour de bon. Je pourrais très bien ne jamais revenir ici. Je pourrais adorer rester l’ombre de ton ombre. On pourrait silencieux d’extase inspirer toutes nos heures avec emphase. Je pourrais très bien sentir tes lignes se crisper et se tendre. On pourrait enfin ne plus communiquer. Tu pourrais me passer l’alphabet de la main à la main. Je pourrais très bien sentir tes lignes se crisper et se tendre. Du monde nous pourrions avoir le vertige. Les conifères pourraient être nos flambeaux. Tu pourrais regarder les feux de la ville. Je pourrais à tout prix me rendre inutile. Tu pourrais discerner mon souffle régulier du fracas des eaux. Cette nuit au bois de boulogne pourrait encore rester calme. Nous pourrions devenir commensaux. Je pourrais te proposer la grande cascade et sa nage de homard bleu à la réglisse. Tu pourrais préférer le châlet des îles et son pianiste déconcertant. Mes mots pourraient très bien se déplier se déployer puis s’effacer. Je pourrais te passer les lettres de la main à la main. Nous pourrions nous passer d’un tête à tête. De mes courbes manuscrites tu pourrais faire d’amples libations. Un couple d’échangistes pourrait très bien se méprendre et puis s’impatienter. Nous pourrions très bien tromper l’ennui. Il se pourrait que je vienne sans billet d’absence. Tu pourrais me passer les strophes de la main à la main. Je pourrais très bien sentir ton dos se crisper et se tendre. Tu pourrais très bien t’en tenir à la surface. Nous pourrions être aveuglés par l’obscurité de nos paupières closes. La route de la grande cascade pourrait très bien ne plus jamais mener ici. On pourrait sentir le bout de cette fête bruyante et bizarre se fendre. Nous pourrions ne pas nous retrouver tels quels. Il se pourrait que je regarde vers le phare de la tour eiffel. Il pourrait y avoir une réponse à tout et même au silence. On pourrait très bien se lire dos à dos sur la grande cascade. Je pourrais te passer le crayon de la main à la main. Le ciel pourrait ne pas pleurer pour une fois. Il se pourrait que je n’ose plus pendant des mois. Tu pourrais tout de même trembler un peu. Je pourrais rester dans l’ombre de ton ombre. Rien ne pourrait nous arriver. On pourrait très bien le lendemain vider les poubelles comme chaque matin. Il se pourrait que la nuit soit calme. Je pourrais très bien avoir un peu peur. Tu pourrais te perdre dans les lumières de suresnes. Le bois pourrait pour une fois se passer de soleil et de raison. On pourrait peut etre enfin ne plus communiquer. La route de la grande cascade pourrait ne plus mener nulle part. Je pourrais enfin déguster ton inutilité. Tu pourrais tarder à me passer les vers de la main à la main. Nous pourrions nous passer du temps. Il se pourrait que l’on soit dehors aussi bien que dedans. On pourrait très bien sentir nos lettres se crisper et se tendre. On pourrait sentir la fin de la nuit approcher. Les travestis pourraient très bien nous envier. Il pourrait y avoir un trou dans l’eau qui dort. On pourrait entendre les navires pousser leurs soupirs. On pourrait très bien dos à dos au sommet de la grande cascade accroupis sur la roche hideuse ne rien se dire. Les souvenirs pourraient très bien raccourcir. Nous pourrions nous passer les paragraphes de la main à la main. Tu pourrais sentir les a priori se refermer et se resserrer dans le décor. On pourrait très bien se détacher et se diriger vers les grands désirs muets. Il pourrait alors être l’heure des grands départs dans l’autre sens. Tu pourrais faire comme si c’était toujours décembre. Je pourrais enfin me rendre inutile. Tu pourrais toujours regarder les feux de la ville. Il se pourrait que vienne le temps de la dernière danse. Des nuits on pourrait n’en avoir plus beaucoup. Tu pourrais voir l’aube claire s’allonger sur les conifères. Je pourrais t’écrire cette lumière absinthe. Tu pourrais sentir mon souffle régulier à côté. Il pourrait y avoir un risque de voir les pages éclater et se fendre. Le bois pourrait se passer de soleil et de raison. Je pourrais te passer le crayon de la main à la main. Le ciel pourrait être blanc cassé. Les rimes pourraient enfin s’absenter. Loin de cette fête bruyante et bizarre la vie pourrait rester un dimanche sans fin. Nous pourrions devenir commensaux. Tu pourrais enfin effleurer mon inutilité. On pourrait très bien s’écrire dos à dos sur la grande cascade. Je pourrais garder les brouillons pendant mil ans. Tu pourrais très bien te passer de moi. Je pourrais très bien te passer les phrases de la main à la main. La nuit pourrait très bien se passer sans incident. Il se pourrait qu’en fin de semaine tu aies du temps. On pourrait très bien en rire dans mil ans. Le bois de boulogne pourrait ce soir là se passer de soleil et de raison. Il se pourrait que j’arrive en retard pour te trouver déjà accroupie sur la roche hideuse. La peur de l’autre pourrait nous frôler.Je pourrais très bien ne jamais revenir ici. Tu pourrais adorer devenir l’ombre de mon ombre. On pourrait enfin ne plus communiquer. On pourrait très bien se lire dos à dos sur la grande cascade. Il se pourrait que tu me dises au revoir. Il se pourrait que je te dise à plus tard. Il se pourrait qu’en fin de semaine tu aies du temps. On pourrait très bien s’écrire dos à dos sur la grande cascade.
    Stan

  2. Meerkat> je suis flattée que tu m’imagines gracieuse ;) . J’aime cette image du balancier. Elle complète bien celle des racines je trouve. Le ciel et la terre, les deux morceaux de l’univers.

    Frisaplat> C’est parce qu’elle m’apporte une sensation de liberté que j’aime la marche. C’est sentir son corps ancré dans le monde, un peu comme, aussi, lorsque la fraîcheur de l’air nous fait sentir notre enveloppe de chair.

  3. Meerkat a raison, gracieuse te va bien. Gracieuse, hésitante,et pourtant rayonnante de vie :-)

    L’extraordinaire avec la confiance en soi, c’est qu’il nous est toujours possible de la reconstruire. La retrouver serait un beau défi pour 2008, non ?

    Alors, marche, danse, et à bientôt dans la Joie

    Je t’embrasse

  4. Stan>
    Si Tu Aimes la Nuit,
    Tu as posé le pied sur la ligne
    Qui me sépare du monde
    Je me suis toujours demandée
    Par quels chemins tu avais
    Saisi ce fil étranger

    Tu as fait apparaître
    Une cascade de mots en litanie
    Derrière laquelle j’attends
    Mon ombre allongée
    Je me suis toujours demandée
    Comment tu avais su
    Tirer ce trait messager

    Il a dit
    « Créer des liens »
    Je suis derrière la cascade
    Rideau fêlure d’un monde
    Ombre d’une ombre
    Sur le mur d’eau en fusion
    Aux vagues perséphones

    Il a dit
    « Si, j’y gagne, à cause de la couleur du blé »
    Et il faudra dire
    Tu pourrais ne jamais revenir
    Tu pourrais avoir perdu le fil
    Derrière une cascade opaque et sombre

    Et je dirai
    Si, j’y gagne, à cause d’une cascade
    Une tourelle, une plage d’or fondu
    A cause des étoiles dans le sable
    Et des mystères irrésolus

  5. Christie> Qu’il est difficile d’écouter son intuition! Comment être sûre qu’elle n’est pas parasitée par nos angoisses, par notre éducation, etc. ?

    L’Arpenteuse> C’est un beau défi pour 2008 et pour les quelques années qui suivront! ;)
    Je suis tellement consumée par la colère!
    Je t’embrasse aussi!

  6. christie> Si seulement on pouvait apprendre dès l’enfance à s’écouter, si seulement d’autres qui pensent savoir à notre place ne nous avaient pas appris à douter de nos propres perceptions…

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