Tu voudrais cheminer percé par des lignes de fuite brisées
Médusé par ces verticales coupantes au-dessus de ta têteTon regard me pousse je glisse sur la plaine encerclée
Qui se résume à cette place que je rêve campo sorcierOn pourrait traverser par le traghetto de l’autre côté
Tu le sais toi qui tourne le dos quand je m’échappeTu détournes le regard et tu files déjà sur la crête
Lignes brisées qui me poussent c’est ainsiQue se sont télescopés deux rêves dans une ville
Archives de l’auteur : Serenissime
Desolatus
J’ai des papillons dans les ramifications de mon esprit
Ceux-là même qui naissent la nuit et s’évaporent au réveilCeux-là même qui d’un frémissement d’aile ont le pouvoir
De transformer un monde en équilibre sur la faille de mon espritAu réveil dans les ruines de la ville bombardée
Où je me promène prisonnière d’un rêve où naissentLes papillons blancs des lignes noircies de ma poitrine
Opprimée chaos d’un cosmos sur la carte du solDebout debout sur la faille le fil de mon esprit
Chaos sur la faille debout sur le fil sur le solTombe sur les genoux dans les frémissements
D’un chant qui brûle je suis flambeau je suis torcheUne lueur derrière les yeux qui se répand flammes
Dans ma poitrine et sur la ligne d’un sol qui sonneChaos vibratile m’arrache moi colonne les yeux fermés
Papillons frémissants portez le chantPortez-moi incomplète sur le fil d’un monde
Qui brûle dans le rêve infini d’une nuit blanche
Dans les marges
Jamais je n’avais eu à ce point le sentiment d’écrire dans les marges ; ce que nous faisons quoi qu’il en soit ; aussi bien je me demande où les autres trouvent toutes ces pages blanches.
Éric Chevillard, L’autofictif
Je me verse au creux de cette nuit
Je me verse au creux de cette nuit
Et tu cours trop vite pendant que les voix chuchotent
Je les cherche du regard
Tu as renversé le thé que tu m’apportais
Petits pas de fourmis tu regardes à tes pieds
Je me verse encore sans corps sans corps
Sans bruit dans une image avec flou de bougéTu es parti les mains dans les poches
Les épaules rencognées shootant dans les cailloux
Les cailloux pointus pointus pointus point tu
Tu ne reviendras point je ris je crois
Oui sans doute les courants d’air font battre les portes
J’ai cru un instant j’ai cru que j’ai riJ’ai cru j’ai cru
Colonne…
Colonne élevée comme rouge alentour
L’ombre du tableau fait le siège du temps
Dô

Je sens mon corps disparaître et mon esprit s’échapper. Assise ma tête est mon lest enroulé. Je tends mes bras jusqu’à la pointe des doigts pour saisir la lune et oindre mon front de ses rayons. Mon crâne est suspendu au ciel. J’enfonce mes talons dans la terre pour pousser des racines et mes genoux fléchissent comme des ressorts. Mon bassin bascule et je m’enroule encore. Mon esprit et mon corps me sont revenus et je m’endors enfin.
Écho
Tu as laissé une trace sous la voûte une clameur solitaire sur la sente.
La porte
Franchis la porte cette arche pont changeur nul battant un vide pour seuil et une muraille traversée par une onde un corps en apesanteur qui pourrait tournoyer mais une porte à franchir fente meurtrière ferme les yeux retiens ton souffle tu flottes dans ta robe d’air nulle sentinelle nul gardien plonge sous l’arc ployé il n’y a rien de l’autre côté.
Naissance
J’ai enjambé un ciel froissé inconsciente dans mon moule qui se fend perdue dans le mystère tressé d’un ciel indéfait le talon enraciné dans la lande crépue le coude dans l’horizon feutré chaque chose me semble à sa place sous un soleil en quartiers chacun de mes rouages dentés luisent dans mes cheveux qui cascadent dans la mer éternellement effondrée éternellement défaite dans le reflet d’un ciel changeant d’un ciel naissant.
La tempête

« La tempête » de Giorgione
Vers 1510 – Galleria dell’Accademia, Venise, Italie
Le silence de la tempête
Ma voix s’élève dans le silence. Absorbée tout entière, souffle inaudible. Ai-je dit quelque chose ?
Une parole emportée par la tempête, cortège des feuilles mortes dispersées par le vent. Courent en remontant la rue ou tourbillonnent un instant.
Ma voix s’élève dans le silence. Celui de mon esprit dans la tempête. Ai-je dit quelque chose ?
Une parole emportée par le vent, aux quatre vents, jetée sur la route. J’entends siffler les châtaigniers et grincer les cyprès du cimetière.

Vous me le copierez 807 fois…
Peut-être avez-vous entendu parler de ce projet tout à fait bizarre mené par le sieur Franck Garot ? J’avoue, j’ai cédé à la tentation, j’ai (un tout petit peu) participé à cette manifestation de folie collective.
Heureusement, tout ceci va — enfin! — s’arrêter. Oui, lundi, c’est le bouquet final des 807 (et ne le répétez à personne, hein, j’y serai ce jour-là, à 9h07).
Ébauche d’un portrait
Puisque le temps s’est retiré
Tu puises dans un lieu
Que je ne puis dire
Désert en silence
Où le plein est en creuxLa raréfaction du sens
Te répond par la chute
D’un signe non pas
Celui de la main
Dont l’empreinte a disparuEt je te crois
Tu parles d’un chemin
Étroit comme un fil
Où seule la feuille
Se plie pour passerMissive montant
Ce Novembre en filigrane
Ton portrait
Obscurci dans la seconde
Figée
Le chant anthracite
Quand tu cries
C’est le chant
De la création
Quand tu crées
Il se pourrait
Que je meure
Encore une fois
Guérison
Quand la langue dépecée
Mots arraisonnés devant
Moi Quand les ruines
Lacérées se rangent
À l’endroit tu
Crains soudain
Cette violence aux bords
Coupants
Comme ce
Ruban noir qui coule
Dans tes veines
Et
Ton reflet défiguré
Sur un vitrail
Bleu qui pourrait
Être la lucarne du ciel
Par où s’échapper