You are seen

Pourrai-je sans plus attendre voir la Grande Ourse se dévoiler à la fontaine se répétant dans les cieux gris dans l’aube grise dans l’ombre pourpre des orages dans la couleur de l’ozone dans l’étoile des feuilles enfuies en touches de terre de Sienne de tempêtes

J’ignore sans doute le creux de ta main sans son secret cette pointe de flèche sans retour sans la colonne qui nous tire vers notre propre ciel aux contours aux confins à toutes les fins

Je te sais dans l’absence dans la valse lente des instants qui s’étirent se contractent se dissolvent dans l’onde tournoyante du monde

Pourrai-je écouter encore la voix qui me guide dans cette ascension ce vertige de profondeurs sombres et douces où tout souffle courbe le temps et courbe la danse des vœux le velours de la mousse l’usure de la pierre

Cette voix s’éteindra-t-elle s’enroulera-t-elle dans l’absence calfeutrée des pensées des violettes du lierre et sa feuille en pointe de flèche

Ce rétrécissement des fissures où j’ai fui dans le creux dans l’ombre dans le vide est-ce que ce voile flotte est-ce qu’il se déchire est-ce que je vois enfin

La source et l’embouchure la naissance et la poussière la nuit et la lumière

L’arbre défait qui se tient devant moi

Silence

 J’aime regarder toutes ces choses du dehors qui bougent presque imperceptiblement. Cette herbe qui frémit, légère. Le feuillage de l’arbre lointain au travers duquel filtre la lumière du soir. Les pétales blancs du pommier qui tombent aussi doucement que des flocons de neige. Cette branche qui se balance au rythme d’une musique intime.

Et puis, tout à coup, le temps se fige.

Seule la silhouette d’un oiseau tressaille dans le crépuscule.

*

Sombrer

La nuit creuse sa galerie dans mes entrailles

et j’y sombre
corps et

Peut-on marcher sur l’amertume
quelques pas sans empreintes
percés par les pointes du silence ?

C’est le corps te dis-je
mille fois replié dans la spirale des voix
humaines

et au centre d’un lac d’eau salée
cette barque sans rameur
ce n’est pas elle qui sombre

*

La nuit n’a pas fini de creuser
je sens l’acide de ses vagues
qui me lèchent

corps et

J’irai jusqu’à la barque
malgré la nappe de silence
sur les eaux salées

ça ou sombrer