Nous jetterons les dé-
……….Sirs qui ne sont pas
Partagés dans le feu
Qui borde la forêtL’onde légère
Courra sur le
Crépuscule
L’aube lointaineNous nous souviendrons
De ces jours
Du bleu au rouge
……….Qui glissentLes bras plus
Hauts que les yeux
S’ouvriront
Plongeant dans l’ombreNous nous dévoilerons
Et nus
Nous disparaîtrons
Au fond de l’absence
Archives de l’auteur : Serenissime
Les bulles rêvent-elles?
Fut Venise
17 août
Arrivée à Venise le 16 au matin. Il est difficile de reprendre contact avec la ville. Difficile de faire renaître la magie d’être présent, et offert à un lieu. De nouveau cet écran tendu devant mes yeux qui affadit et rend irréel le lieu, le transmue en image. Il me faudrait le toucher, sentir la pierre chaude ou mouillée, effleurer l’eau lente d’un canal.
En fait, je ne suis pas encore arrivée et arriverai-je ? Mes sens sont murés. J’ai trop longtemps perdu le contact. Cinq heures de marche n’y ont encore rien fait.
24 août
Je n’arriverai sans doute pas. Pas cette fois-ci. Je ne me sens pas à Venise. Je ne me sens nulle part. Je n’habite pas. Je ne m’habite pas. Je n’habite pas le monde.
25 août
San Angelo Raffaele
Je voudrais boire la solitude à me rompre l’âme. Aussi comme on dit rompu à un exercice. Un autre moyen de me retourner à nouveau vers moi ? Comment ne pas se dissoudre dans la pensée magique du corps — santé et gestes ?
C’est dans mes pas que je veux me fondre, dans les murs chauds, dans l’eau ambiguë du canal.
Comment ai-je pu à ce point me perdre, me perdre de vue ? Je me suis pourtant débattue si fort, pour rien ?
Et je suis là, sans lieu. Sans richesse d’âme. Comme une éponge lourde imbibée d’eau.
Campo S. Margarita
Je bois à toutes les fontaines.
Pourquoi tant de difficulté à me fondre, cette angoisse d’une osmose avec le monde extérieur ? Je ne veux pas me livrer et je reste enfermée en moi-même.
Et puis cette analyse me lasse. Je suis ici, et pas là-bas.
La couleur du ciel
Je t’ai menti sur la couleur du ciel. Je t’ai menti sur l’existence des pierres. Mes blancs mensonges ont creusé la faille que je vois à mes pieds. Insondable crevasse où les mots s’éteignent, aveugles qui sombrent.
Artifice
La rose éclate et le pendule s’écrie. L’arbre sourit et la ruse s’émeut. Aujourd’hui comme hier étaient alignés comme une ficelle pour étendre le linge. Immense erreur et éternel oubli. C’est cette liturgie qui exaspère la tête et le bec et étouffe la balancelle. Écoute-moi, tu peux conduire cette avancée d’héliotropes vers un verre bleui plus large et grandi comme ce vitrail à travers lequel rien n’est possible et rien n’est impossible. Et toi, tu m’écoutes. Tu écartes le voile qui cèle l’oubli. L’oubli est souvent préférable à l’orme et à l’érable vermeil. Écoute-moi, il faut encourir la verticalité étouffante et assouvie. Écoute, toi, je t’aime comme est bleue l’arche qui joint le possible et l’impossible. Et les coups si mélangés si pointus qui soulèvent un cœur enfermé. Tu es là, amertume glacée et l’acerbe brûlure. J’embrasse l’irrémédiable élément. Et tout de suite, la liqueur s’écoule comme une goutte de pluie sur la vitre de la croisée aux lambeaux dorés. Sage dissolution, lente fusion, étrange évaporation d’où s’échappe la clameur des moindres parcelles de l’élément. La rose éclate et le pendule s’écrie. L’arbre sourit et la ruse s’émeut. Aujourd’hui comme demain s’éteindront et la poussière en halo s’éparpillera dans la plus profuse confusion de l’élément. L’artifice s’attarde en chemin quand s’abat le reflet de l’étang. Dans le trouble des couleurs élancées, tu te mêleras et la terre, pour qu’elle puisse se fendre, éclatante, s’épuisera. Adieu champ d’asphodèles sauvages et brume élaborée. Frappe du bec et tu apercevras dans le fond une forteresse en ruine envahie par le peuple de l’élément. Accuse le trait qui perfore la feuille d’acanthe modelée par un vent de vertige. Tu vois, je marche sur la carte, sur l’eau et sur le ciel à la lettre indélébile. La quille de la barque est prise de ce vertige et l’élément est menacé par l’engloutissement dans une plénitude angoissante et reçoit mille traits oranges et rouges dans les yeux. Écarte le voile et regarde. Les papillons et les scarabées, les lucioles, les libellules, le moustique et l’araignée s’éloignent et se rapprochent dans un tourbillon et tout se détache, comme les membres dans la nuit et la recherche est longue et le cœur palpite et les images se fondent dans le vide magnétique.
Aube grise
Aube grise
Glissante sentinelleTu viens désert
Mettre au jourUne jungle éteinte
Blanche étincelle
DépolieIci
Sur le seuil
Brisé
Abécédaire martien
Articaline
Bloguatol
Claspival
Drimastère
Éristaphule
Froutanciel
Gulamalne
Habbabal
Iristide
Judéomée
Koraxiphore
Loufacerty
Mégaclès
Nuktéris
Oclarène
Pitakne
Quisouimo
Recilo
Skimpous
Tloli
Uplicotéros
Vaillecikeul
Wruzille
Xubalère
Yéloufare
Zouplache
Marque-page (2)
Le feu
Profond et délaissé
Le cours tortueux des glycines
Comme une émeraude
Envahissante qui rayonne massive
Au fond
Et tout se confond dans la torpeur
Des calmes canaux au fond
Desquels pourtant rien ne repose
En paix
Je me suis perdue dans le feu
Des murailles
Les gouttes de pluie
Salées de la lagune
Atteignent pourtant
Ce jardin si mal enfui
Au fond
Mais je sais que plus je le parcours
Plus il s’abîme
Dans les calmes canaux au fond
Desquels pourtant rien ne repose
En paix
Si belle en ce miroir
Mars, 12
Tu vois donc ce puits de l’imaginaire ressemblance adaptée, recordée, ébloui par l’étincelle d’un rêve sans portée : querelle, et suite époustouflante de délices écarlates, blanche comme la nuit éternelle du poisson qui ne respire pas et adjure le pêcheur à l’engloutissement, pour que ses membres, un à un, disparaissent à l’irrémédiable tempête ordinaire et sanglante.
Un petit instant de grâce
Je suis le secret enfoui dans l’odeur d’herbe fraîchement coupée, dans le houououhh du vent s’engouffrant dans le conduit de cheminée, dans les cent mille doigts de l’averse de neige, dans la nacre d’un matin de printemps, dans le message muet d’un alignement de marrons d’Inde, dans la déclivité de la plage et la danse des poux de sable ; je suis ce qui jadis vous rendit vivant, je fus l’instigateur de tous vos émerveillements, de tous vos étonnements, je suis l’unique raison pour laquelle quiconque jamais, s’aima et aima, je suis le secret qui irrigua chacun de vos secrets d’enfant, je suis l’ange que tout enfant porte en filigrane et que vous avez tué. Je suis vous.
(Merci à mamansursaplanète qui m’en parla ici)
Mars, 11
L’aube est la porte derrière laquelle se prolonge l’enfantement de l’orbe aveuglant et dense, et la terre, dentelée en ses hauteurs comme en ses abîmes, en attend l’infranchissable entrebâillement.
La passante
J’ai oublié d’ouvrir la porte, j’ai oublié l’odeur du café, j’ai oublié la couleur de tes yeux, j’ai oublié de partir, j’ai oublié la lettre de cachet, j’ai oublié que tu m’aimais, j’ai oublié le rebord plissé du ciel, j’ai oublié d’arroser le jardin, j’ai oublié ce qu’il y a derrière l’horizon, j’ai oublié d’avoir peur de l’orage, j’ai oublié l’ennui, j’ai oublié la page 42 et le chapitre 7, j’ai oublié de caresser le chat, j’ai oublié le bruissement du vent dans le feuillage, j’ai oublié de me taire, j’ai oublié la vérité, j’ai oublié le chemin, j’ai oublié la colère, j’ai oublié ton sourire, j’ai oublié les clés, j’ai oublié de fermer la fenêtre, j’ai oublié de mourir, j’ai oublié ce grain de beauté que tu as au coin de l’œil, j’ai oublié où je suis née, j’ai oublié ton nom, j’ai oublié le sommeil, j’ai oublié la chute.
Mars, 10
Tu me bois, œil qui écoute : elle dort, elle s’épuise. Les bras de la forêt t’étouffent, homme qui rêve.