disparition de la mer

(à Christine Jeanney)

je m’étendrai à même la grève
la nuit bordera ma couverture de sable
et la mer chantera sa berceuse
à mes oreilles en forme de coquillage

quand la tempête aura glissé jusqu’à moi
je serai prête

je ramasserai la nacre du ciel
et je lui offrirai à genoux

dans le tohu bohu d’avant la création
j’ai entendu battre les pulsars

c’était l’impulsion

qui

manquait au mouvement des corps
marchant sur la grève

au rythme

exaspérant

d’un pas en arrière

d’un pas en avant

vagues vagues

et quand je me suis retournée
la mer avait disparu

dans la remontée du temps
chantant sa litanie d’étoile en étoile

langue brillante de sel
la trace du dernier coquillage

dans le sable veuf
qui m’avait enveloppée
dans son secret

8 réflexions sur « disparition de la mer »

  1. Vague , vague
    Je pense , avoue .
    Inconsolé , inconsalable .
    La mer a nos noirs silences recouvert .
    je m’indélimite , indéchiffrable , au tombeau de nos traces .
    J’ai heurté moi aussi les rivages fluctuants des baisers de mer .
    Qui s’en sont retournés , émaux émus , vers de nocturnes funéraires .

    Dispartition de la mer .
    Tant de notes ont le goût de sel .
    De celles qu’on aime mais que l’on quitte .
    Que l’on aime à quitte ou double .
    De ces voyages élémentaires dont on ne jamais s’acquitte .
    Partir , revenir
    se larver un peu plus au fil du fil .

  2. merci Juliette, et comme ta mer est ample, large ! me sens en sécurité, à côté de toi, à cause de « quand la tempête aura glissé jusqu’à moi je serai prête » qui n’est pas rude, pas un combat, un accompagnement. merci

  3. Encore un beau texte qui m’a, cette fois, entraîné dans les ciels étoilés où l’on quête les secrets de la naissance de ce monde et le secret de sa propre vie (Jean-Pierre Luminet en parlait de façon lumineuse à la radio la semaine passée). Beaucoup de sécurité comme le souligne cjeanny, de « apaisance »….. Sécurité que j’ai ressentie hier dans Lyon couverte de neige, la neige a aussi cette vertu de remettre dans un état de calme intérieur ou antérieur.

  4. Lebrac, j’aime votre « je m’indélimite » et aussi vos baisers de mer.

    Christine, en fait je suis surprise du contraste entre l’atmosphère de ce poème « apaisé » et l’état intérieur dans lequel j’étais en l’écrivant (exaspérée et en colère). Peut-être que, en première analyse, cela traduit l’effort que j’ai fait sur moi-même pour me calmer pour pouvoir écrire, recréer autour de moi la coquille sécurisante d’où je peux lancer les mots comme une ligne de pêche.

    kouki, merci ma belle :-)

    Gilles, Jean-PIerre Luminet j’ai en effet vu son nom hier en allant sur France Culture écouter Valérie Rouzeau. Un poète astrophysicien (et réciproquement), ça me plaît ;-).
    Étonnant pour moi cette sécurité que vous mettez en exergue Christine et toi. Et puis peut-être pas finalement: j’ai ressenti l’écriture de ce poème comme un pas en arrière (ce qui apparaît littéralement dans le poème), c’était sûrement un pas en arrière pour retourner en terrain connu après avoir pris un peu plus de risques ces derniers jours. Avant, je l’espère, de reprendre mon cheminement.

  5. Luc, par exemple:
    Aurore ou
    Zéphyr
    Ecoute le
    Roman des amours de
    Tristan et
    Yseult

    Gilbert,
    c’est vrai, la mer disparue, c’est l’impensable. Sel ou sable elle s’appelle alors désert?

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